Serait-ce le calme avant la tempête ? En 2020, les défaillances d’entreprises ont connu leur niveau le plus bas depuis 30 ans. Ce phénomène s’explique par le soutien sans précédent du gouvernement, dont l’objectif était précisément de préserver la trésorerie des entreprises touchées par la crise.
Malgré cela, beaucoup d’entreprises se retrouvent fragilisées et sont vulnérables au moindre aléa. Ainsi, les chefs d’entreprise continuent de faire face à de nombreux défis pour maintenir leur activité. Cette période, particulièrement complexe pour eux, impacte fortement leur santé et leur vie personnelle, avec des conséquences parfois lourdes : divorce, dépression…
Si vous êtes confronté à des difficultés dans la gestion de votre entreprise, n’attendez pas pour réagir. Des dispositifs concrets existent pour aider les dirigeants, et éviter ainsi dépôts de bilan et burn-out en cascade.
Quels sont les accompagnements dont peuvent bénéficier les patrons en difficulté, tant au niveau opérationnel que psychologique ?
Médiation et conciliation : deux leviers efficaces pour affronter la crise
Il suffit parfois d’une facture impayée ou d’un retard de loyer pour déséquilibrer les comptes de l’entreprise. Or, il existe plusieurs dispositifs créés pour accompagner concrètement les entreprises confrontées à ce type de difficultés.
Le Médiateur des entreprises fait partie des interlocuteurs à solliciter dès l’apparition d’un différend avec une autre entreprise ou une administration. Sa mission consiste à aider les parties à trouver une solution mutuellement acceptable, de façon neutre et impartiale. Ce service a pour avantage d’être entièrement gratuit et confidentiel. Le Médiateur des entreprises pourra notamment intervenir en cas de :
- Conditions de paiement non respectées : retards, retenues non justifiées, pénalités abusives
- Services ou marchandises non conformes
- Modification unilatérale ou rupture brutale de contrat
- Non-respect d’un accord verbal
En 2020, les saisines de médiation ont été multipliées par 3 par rapport à l’année précédente. Fait nouveau : elles provenaient essentiellement de TPE et PME, pour des problématiques liées aux baux commerciaux et aux conditions de paiement. Le taux de succès des médiations s’élève à 70 %
Autre institution à connaître : le tribunal de commerce, ou tribunal judiciaire pour les professions libérales. Il suscite généralement l’inquiétude des entrepreneurs puisqu’il est chargé de traiter les litiges. Pourtant, il n’a pas qu’un rôle de sanction.
Il remplit également une mission de prévention et d’accompagnement, à travers le mandat ad hoc ou la procédure de conciliation. Ce dispositif s’adresse à toute entreprise rencontrant des difficultés juridiques, économiques ou financières. Un mandataire ou conciliateur est alors désigné par le tribunal pour négocier à l’amiable et de façon confidentielle les dettes de l’entreprise.
Le saviez-vous ? Vous pouvez vous faire accompagner par un expert-comptable pour engager la procédure de conciliation ou de désignation d’un mandataire ad hoc.
Attention : il est indispensable d’anticiper pour mener ces actions préventives. Si votre entreprise est en état de cessation de paiements depuis plus de 45 jours, la procédure de conciliation ne pourra pas être mise en œuvre.
Un accompagnement psychologique pour les dirigeants de PME
La charge mentale des chefs d’entreprise, déjà considérable en temps normal, est décuplée dans le contexte de crise sanitaire et économique. Ils sont souvent seuls pour faire face aux difficultés, qu’elles soient avérées ou prévisibles.
L’isolement que connaissent de nombreux patrons de petites entreprises, peut aggraver cet état de stress, voire de mal-être, et conduire au burn-out.
N’hésitez pas à vous tourner vers des réseaux d’entrepreneurs, pour partager vos difficultés et bénéficier du soutien et du retour d’expérience des autres membres.
On peut citer par exemple l’association SOS Entrepreneur, qui a vocation à accompagner les dirigeants de PME en difficulté. Une ligne téléphonique confidentielle a été mise en place, pour les écouter et leur proposer des solutions de rebond selon une méthodologie éprouvée.
Conscient du risque, le gouvernement a également mis en place depuis le mois d’avril 2020 un numéro vert destiné aux chefs d’entreprise en détresse. Actif 7 jours sur 7 de 8 heures à 20 heures, il offre une première écoute et un soutien psychologique. En fonction du cas de figure, le chef d’entreprise pourra bénéficier d’une prise en charge rapide, gratuite et confidentielle par un psychologue, ou être réorienté vers une structure spécialisée.
Ce service d’écoute est géré par le dispositif APESA (Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aigüe). Il s’agit d’une initiative déployée au sein de 64 tribunaux de commerce. Là encore, ce sont les PME qui sont au cœur de l’accompagnement, avec près de 500 chefs d’entreprise qui ont pu être aidés depuis sa mise en place.
Vers une meilleure prise en charge de la santé des dirigeants par la médecine du travail
La question de l’accompagnement des dirigeants en difficulté, voire en situation de détresse, s’inscrit dans le cadre plus général de leur santé au travail. Il faut savoir qu’à moins d’être salariés, les dirigeants ne font l’objet d’aucune prise en charge par la médecine du travail. Et encore, cela ne veut pas dire que les dirigeants salariés effectuent leurs visites médicales avec assiduité. Il faut dire que les chefs d’entreprise ont souvent du mal à reconnaître leurs propres difficultés.
Créateurs de valeur et d’emploi, ils sont responsables de la bonne marche de l’entreprise auprès de leurs partenaires et de leurs salariés. En toute logique, beaucoup se voient comme des apporteurs de solutions et n’ont pas l’habitude de s’épancher sur leurs problèmes.
Mais la crise économique liée à l’épidémie de Covid-19 a mis la lumière sur ce besoin d’intégrer l’ensemble des travailleurs non-salariés au parcours de santé au travail. Ce sujet fait d’ailleurs partie des thèmes abordés dans une proposition de loi déposée le 23 décembre 2020pour renforcer la prévention en santé au travail. Il y est notamment question de permettre le suivi des « travailleurs indépendants et chefs d’entreprise non-salariés, dans le cadre d’une offre spécifique de services en matière de prévention, de suivi individuel et de prévention de la désinsertion professionnelle ».
Sur le terrain, certains acteurs n’ont pas attendu la mise en place de la réforme pour accompagner les dirigeants. C’est notamment le cas du Pôle santé travail 66 dans les Pyrénées-Orientales, qui propose des visites médicales pour les employeurs. Cet organisme est également le pilote de l’application Apptiv, créée pour faciliter le suivi de la prévention santé au travail, et qui inclut les dirigeants dans son protocole.
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