Pour rappel, Leka a été créée en 2013 par Ladislas de Toldi et Marine Couteau, deux passionnés d’innovation et de robotique. Alors que Ladislas et Marine suivait leur cursus en école d’ingénieur, leur professeur de design leur a proposé de travailler sur un jouet adapté aux enfants touchés par l’autisme comme l’était son fils. Ce projet était alors le point de départ d’une nouvelle aventure, l’aventure entrepreneuriale.
Ils imaginent alors un robot capable d’interagir avec les enfants, le robot doit être à la fois ludique et intuitif. Le pari est lancé et voici maintenant deux ans que l’équipe Leka développe ce projet.
En outre, afin d’être au plus près des besoins des enfants, l’équipe travaille avec les familles et des spécialistes du domaine. Leka deviendra l’ami des enfants atteints d’autisme, leur compagnon de jeu. Le jouet robotisé sera là pour les stimuler au quotidien et sera capable de montrer des émotions en interagissant avec eux. En fonction du comportement des enfants, il parle, émet des vibrations et de la lumière. Les enfants pourront alors travailler l’apprentissage du langage, apprendre les couleurs, etc.
L’engouement pour ce robot a été immédiat pour les familles d’enfants autistes à tel point que certains demandent si le robot serait adaptable pour les enfants atteints par d’autres pathologies comme les troubles de la vision. A force de rencontrer les familles et de tester le petit robot, les équipes se sont rendus compte qu’il était adaptable à tous les enfants que l’équipe Leka qualifie « d’exceptionnels », à savoir les enfants affectés par des troubles sensoriels, moteurs ou relationnels.
Leka permettra aux enfants de faciliter leur développement et leur bonne intégration.
Le projet est indéniablement innovant, et il ne s’agit pas uniquement d’innovation technologique. En effet, le projet repose sur un business model innovant inscrit dans un nouveau type d’entrepreneuriat qui n’est autre que l’entrepreneuriat social.
Pas question pour nos fondateurs de rendre ce smart toy accessible uniquement aux personnes dotées d’importantes ressources financières, au contraire, le but est de le rendre accessible au plus grand nombre. Le financement du projet repose sur une campagne de crowdfunding, le but étant de recevoir un maximum de précommandes pour bénéficier de trésorerie et accélérer le développement du robot.
« Entrepreneuriat social » ? Eh bien oui ! Ce robot aux multiples qualités est proposé au prix de 690€. Par conséquent, nos deux fondateurs se sont alors heurtés aux a priori de ce type d’entrepreneuriat. En effet, pour les investisseurs, difficile d’entrevoir l’opportunité business dans un projet social !
Mais alors, comment faire rimer business et social ? Entre les directeurs de structures médicales qui voyaient en Leka l’opportunité de faire du business et les éducateurs qui ont cru se voir remplacer par un robot, Ladislas et Marine ont dû se montrer convaincants, ils ont alors opté pour une communication toute en transparence et financent leur projet à l’aide de cette campagne de crowdfunding.
L’équipe de Leka revient d’ailleurs de 3 mois au sein de l’accélérateur Techstar à Kansas City aux Etats-Unis.
Cet accélérateur sélectionne des projets et propose différents programmes dont le programme Sprint Accelerator qui permet d’accélérer la croissance de son entreprise en seulement 3 mois. Le but de ces trois mois pour Leka était donc de booster leur projet afin d’atteindre leur objectif de crowdfunding le plus rapidement possible. Plusieurs formules de précommandes sont proposées : le robot seul ou le robot accompagné de différentes applications développées pour une utilisation optimale. L’objectif est fixé à 60 000 dollars et dès le lendemain, plus de la moitié de l’objectif était déjà atteint avec une collecte de plus de 38 000 dollars.
Les livraisons sont prévues pour le deuxième trimestre 2017.
Il est important de noter que ce business model s’inscrit dans une réelle logique gagnant-gagnant car le petit robot permettra de collecter des données sur le comportement des enfants afin de faire évoluer la recherche. L’équipe semble donc avoir trouvé l’équation gagnante.
Entrepreneuriat social, stratégie de communication, business model innovant, soutien à la recherche, revenons maintenant sur les défis surmontés par l’équipe Leka
Votre projet est né d’un projet scolaire, vous avez finalement décidé de vous lancer dans l’expérience entrepreneuriale, comment avez-vous appréhendé les parties commerciale et financière de votre projet ?
L. de T. : En tant qu’ingénieur, la partie technique et la recherche ne nous effrayaient pas du tout, nous y trouvions même un vrai plaisir.
Pour les parties commerciales et financières, même si nous en comprenions l’importance, il nous manquait une certaine sensibilité au début. Pas que nous n’étions pas capables de faire des prévisions financières, mais l’interprétation des résultats et leur « probabilité » étaient plus difficiles.
Mais il a fallu mettre les mains dedans et c’est en avançant petit à petit que nous mis tout ça en place et compris le sens de ce que nous faisions.
Vous avez opté pour le financement participatif via une plateforme de crowdfunding, ce business model s’appuie donc sur un modèle assez innovant, quelle est la part de vos investissements couverte par ce mode de financement ?
L. de T. : Nous avons utilisé le crowdfunding 2 fois :
– avec Sowefund pour lever des fonds en capital auprès d’investisseurs privés, de business angels et de réseaux de BA – Cette levée nous permet de financer la recherche et le développement, et l’industrialisation.
– avec Indiegogo permettant aux futurs utilisateurs de précommander le robot – Cette levée a été réalisée pour faire connaître Leka à l’international (en particulier aux US), créer une communauté de parents et de pros pour nous aider à développer le robot et financer la production de la première série en mai 2017.
Nous l’avons vu, vous avez participé au programme de l’accélérateur Techstars, comment les avez-vous approchés ?
L. de T. : Nous avons été introduits une première fois par le Hardware Club dont nous faisons partie et une seconde fois par la CEO d’une boite passée chez eux l’année d’avant.
Ce premier contact nous a permis de nous faire connaître et de mieux comprendre ce qu’eux pouvaient nous apporter. Ensuite nous avons simplement postulé comme tout le monde et après 7 entretiens Skype, nous avons été retenus parmi 10 startups sur plus de 700 candidatures.
Selon vous, en quoi est-il important de se faire accompagner par ce genre de structure ?
L. de T. : Nous étions et sommes toujours accompagné en France par Agoranov qui est un super incubateur. Techstars est quant à lui bien différent puisque c’est un accélérateur qui ne dure que trois mois mais permet dans ce laps de temps de faire ce qu’on aurait fait en un an sans eux.
Pour nous, Techstars était aussi l’occasion de mettre un pied aux US pour nous développer là-bas. Et sur ce point nous n’avons pas été déçus.
Et de manière générale, c’est très important d’être accompagné quand on lance sa boite car il y a tellement d’erreur à ne pas faire.
Comme nous l’avons vu, pour l’instant, vous financez votre projet grâce à une campagne de crowfunding, comment envisagez-vous votre stratégie financière pour la suite ?
L. de T. : Nous avons finalisé une levée de fonds auprès d’investisseurs français. Mais nous ne nous arrêtons pas là et partons en croisade pour notre Serie A.
Nous l’avons vu, votre robot est en développement depuis deux ans et sera commercialisé à partir de mai 2017, comment gérez-vous la communication d’un projet afin de faire patienter les familles qui doivent être impatientes de pouvoir se procurer Leka pour aider leurs enfants à se développer ?
L. de T. : Nous avons été très transparents sur tout dès le début : le délai, les risques mais aussi les bonnes nouvelles ! La communication claire est transparente est la seule solution pour faire patienter les gens.
D’autre part, ces gens qui ont précommandé sont aussi des « fous » (au sens le plus positif du terme). Ils nous ont fait confiance et je peux vous dire que ça donne une sacrée énergie que d’avoir cette communauté derrière nous pour nous pousser ! 🙂
Votre robot sera proposé à un prix très abordable compte tenu de toutes ses vertus. Aussi, votre projet s’inscrit dans une logique d’entrepreneuriat social. N’êtes-vous pas apparus comme des OVNI de l’entrepreneuriat ? Quelles ont été les premières instances financières que vous avez approchées pour financer votre projet ? Comment avez-vous été accueillis ?
L. de T. : Si et sur deux fronts : la dominante sociale de notre projet nous a beaucoup rapproché de l’entrepreneuriat social mais en même temps nous sommes une SAS et avons un fonctionnement d’entreprise tout à fait standard. L’aspect social est dans l’impact bien sûr mais aussi et surtout dans notre approche du handicap et dans l’intégration continue et permanente de toutes les parties prenantes dans le cycle de développement.
Dans l’entrepreneuriat classique, c’est notre cible qui surprenait : les enfants exceptionnels, personne ne sait ce que c’est si on n’est pas touché soi-même. De fait, beaucoup nous recommandait de commencer par le grand public avant de retourner sur l’éducation spécialisée. C’est aussi là la grande force et la grande différence entre la France et les US : là-bas, notre focus sur un marché de niche pour commencer a été très bien compris et félicité.