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Les entreprises françaises en Afrique

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Lorsque l’on aborde la question de la présence commerciale des entreprises françaises en Afrique, les lieux communs ne sont jamais très loin, or la réalité est bien différente des clichés de la « Françafrique » d’antan. Pour autant, les sociétés hexagonales ont besoin d’accroître leurs débouchés à l’international, et le continent africain enregistrant un développement économique notable, les débouchés potentiels y sont légion.

Certaines entreprises s’en aperçoivent tout juste, y compris d’ailleurs des PME, mais d’autres l’ont déjà intégré à leur stratégie depuis plusieurs années, dont le groupe immobilier Eric Duval. Au-delà des opportunités de croissance, nous évoquerons également les risques pour les sociétés françaises, des troubles sécuritaires à la concurrence acharnée des concurrents chinois.

La présence économique française en Afrique : un état des lieux loin des poncifs

Si vous vous intéressez de près aux conférences proposées aux entreprises françaises – notamment par l’AFD (Agence Française de Développement) et BPI France – vous constaterez que celles traitant de pays africains sont de plus en plus nombreuses, ce qui ne doit évidemment rien au hasard.

De fait, les opportunités en Afrique sont remarquables, la population du continent devant passer de 1,2 à 2 milliards d’habitants en l’espace de 30 ans, tandis que la croissance économique atteint de niveaux attractifs dans la plupart des pays (autour de 5% par an, et parfois plus de 8%). En outre, les jeunes générations sont plus urbaines, plus « numériques », et l’on observe d’ores et déjà l’émergence d’une véritable classe moyenne, au pouvoir d’achat conséquent.

Dans ce contexte, les entreprises tricolores sur place ont une réelle carte à jouer, et elles peuvent notamment s’appuyer pour cela sur les liens étroits qui existent bel et bien entre notre pays et certaines nations d’Afrique francophone, du Cameroun au Sénégal, en passant par le Gabon ou bien encore la Côte d’Ivoire. Alors, bien sûr, pour que les sociétés hexagonales aient une chance de développer leur chiffre d’affaires en Afrique, elles doivent proposer des produits et des services de qualité à des prix compétitifs. Pour autant, le fait de s’appuyer sur un héritage historique commun et sur une culture partagée représente à lui seul un atout indéniable.

Un autre élément-clé à prendre en compte réside dans l’appui que peuvent trouver les entreprises françaises auprès des institutions européennes pour se déployer en Afrique. En effet, l’on a souvent tendance à l’oublier, mais à ce jour, le premier contributeur financier pour le développement du continent africain n’est autre que l’Union Européenne.
Un plan stratégique a d’ailleurs été signé entre l’UE et l’Union Africaine (UA), intégrant notamment un volet sur la présence accrue des PME européennes. La France étant, contre vents et marées, l’un des « moteurs » de l’UE, il serait logique que les sociétés tricolores profitent pleinement de cette démarche partenariale avec l’Union Africaine. Prenons simplement garde à la concurrence intra-européenne, l’Allemagne étant devenu en 2007 le premier fournisseur européen en Afrique.

Notons également que, contrairement à ce que l’on entend parfois, les principaux intérêts économiques actuels de l’Hexagone en Afrique ne se situent pas au sein de la « zone franc », mais d’abord au Maghreb ainsi que les Etat subsahariens n’appartenant pas à cette zone, qui « pèse » moins de 15% de l’ensemble de nos échanges pratiqués en Afrique. Certes, comme nous l’évoquions précédemment, la Côte d’Ivoire ou le Gabon – entre autres – restent des partenaires commerciaux importants, et « rassurants » pour les investisseurs avec un lien étroit entre le franc CFA et l’Euro.
Toutefois, le fait est que Nigéria ou l’Afrique du Sud, par exemple, leur sont désormais passés devant. Cette même logique vaut aussi pour les importations de pétrole et de gaz naturel, et même de terres rares, avec des approvisionnements majoritairement hors zone franc, le Nigéria, l’Angola, l’Algérie, la RDC et l’Afrique du Sud occupant ici des positions clés.

Le fait que nous dépendons moins de la zone franc que d’aucuns auraient pu le croire (et qui doit nous pousser à entreprendre davantage en dehors de cet espace) n’enlève rien au fait que les potentiels de croissance pour les entreprises françaises sur l’ensemble de l’Afrique s’avèrent conséquents. Ainsi, en 2018, l’agence COFACE considérait que sur le seul périmètre des pays francophones, nos entreprises sous-performaient à hauteur de plus de 25% ; combler cette marge de progression permettrait donc un essor remarquable de notre commerce extérieur.

Les entreprises qui réussissent en Afrique – l’exemple marquant du Groupe Duval

Pour qu’une entreprise se développe, elle doit savoir s’exporter au-delà des frontières nationales ; bien sûr, cette démarche n’est pas toujours facile, et les dirigeants se demandent souvent s’ils font les bons choix en ce qui concerne les pays ciblés, mais s’internationaliser est une condition sine qua non du succès. Or, ainsi que nous allons le voir, l’Afrique n’est pas qu’une terre d’opportunités potentielles pour les entreprises françaises, elle représente aussi et déjà pour certaines d’entre elles un vivier économique majeur

Bien sûr, l’on pense ici à de grands groupes tels qu’Eiffage (pour la construction), Orange (pour les Telecom), ou Total (pour les hydrocarbures). En outre, fait remarquable, de plus en plus de PME se lancent également avec succès dans l’aventure, dans des domaines divers et variés, du Groupe Piriou (pour la construction navale) à Nutriset (pour la fabrication d’aliments thérapeutiques)

Si l’on prend l’exemple du Cameroun, les intérêts français font de l’Hexagone le premier investisseur étranger dans le pays, avec des ramifications dans la quasi-totalité des secteurs d’activité. Pour ne citer que quelques exemples, l’agro-alimentaire est notamment représentée par Vilgrain, Castel ou la Compagnie fruitière, tandis que Schneider et Cegelec domine les débats en matière d’informatique et d’équipements électriques, Va Tech étant sur leurs talons. N’oublions pas non plus le cimentier Lafarge, le logisticien Bolloré, et le spécialiste de la distribution CFAO. Nous ne pouvons pas prétendre ici à l’exhaustivité, mais il ne fait aucun doute que l’Afrique attire déjà bon nombre d’entreprises tricolores, jusque dans les domaines voisins de la banque et de l’assurance.

A ce propos, d’ailleurs, l’évolution de la présence du Groupe immobilier Eric Duval en Afrique apparaît significative à plus d’un titre.
Pour mémoire, il s’agit d’un groupe immobilier français employant 4 000 collaborateurs, au chiffre d’affaires de plus de 700 millions d’euros, et dont le patrimoine représente tout de même plus de 2 milliards d’euros.
Très tôt dans son histoire – débutant en 1994 – le Groupe Duval a entrepris une stratégie d’internationalisation ambitieuse, et orientée notamment vers l’Afrique. Après tout, cela se justifie aisément puisque, comme nous l’évoquions précédemment, la population du continent connaît un essor considérable, principalement dans les villes, et un tel pic démographique implique des investissements majeurs et incontournables en infrastructures de logement. L’investissement immobilier en Afrique présente donc un potentiel énorme de retours sur investissement à moyen terme.

Toutefois, là où le Groupe Duval se démarque véritablement, c’est dans sa stratégie de diversification, géographique d’une part, et thématique d’autre part. Ainsi, le groupe est présent dans de nombreux pays africains, qu’il s’agisse du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, des Comores, ou bien encore du Gabon, du Maroc et du Sénégal, sans oublier le Tchad et le Togo, etc.

En outre, si le cœur de métier reste l’immobilier dans toute sa diversité (incluant le tourisme, l’immobilier commercial et d’entreprise), le Groupe Duval s’est lancé dans d’autres secteurs prometteurs, du forage d’eau au micro-financing et à l’assurance, en passant par le recyclage des déchets. Chemin faisant, cette entreprise a donc acquis une expérience très précieuse sur le mode de fonctionnement des différentes économies africaines, notamment dans l’obtention des C2D (Contrats de Désendettement et de Développement) qui ont longtemps été la chasse gardée des grands groupes tels que Bouygues, Eiffage ou Vinci.

Les difficultés à surmonter

Alors que le continent africain a longtemps été présenté comme un véritable « pilier » du commerce extérieur de la France, d’aucuns n’hésitent plus à le définir aujourd’hui comme un « désert commercial », la vérité se situant quelque part entre ces deux extrêmes. Le fait est qu’en l’espace d’un peu plus d’une décennie, les parts de marché des entreprises tricolores en Afrique ont chuté significativement, avec un recul d’environ 15%. A vrai dire, les échanges sont restés quasi-stables en valeur absolue, mais la place prépondérante de la France a été fortement concurrencée, par l’Allemagne, d’une part, mais surtout par la Chine. Il est d’ailleurs tristement paradoxal que nous enregistrions un tel recul de nos positions commerciales dans des pays francophones …

Quoi qu’il en soit, la Chine a réellement « dévoré » nos parts de marché en Afrique ; en 2004, elle générait environ 3% des échanges sur le continent … contre plus de 20% aujourd’hui ! Indéniablement, la stratégie poursuivie par Pékin de réaliser des investissements majeurs dans les pays concernés (notamment en termes d’infrastructures) a profité aux entreprises chinoises.

Par ailleurs, au travers de sa filiale Finafrica (traitant de la finance inclusive, des institutions de microfinance et des compagnies d’assurance en Afrique), le Groupe Duval s’est heurté en 2020 à l’une des difficultés majeures dans certains pays du continent, à savoir la divergence d’intérêts constatée entre les institutions d’un même Etat. De fait, quand bien même Finafrica a participé au redressement de la Banque de Développement des Comores (BDC), l’entreprise française a été contrainte d’arrêter ce partenariat suite à une mésentente avec l’Union des Comores, l’état actionnaire de la BDC.

Enfin, l’Afrique continue malheureusement de pâtir d’une mauvaise image auprès des risk managers, en raison de problèmes sécuritaires persistants, et l’on assiste parfois – comme au Sénégal, en mars dernier – à une poussée de violence anti-française, ciblant notamment les acteurs économiques hexagonaux présents sur place.
Bien sûr, ces crises sont épisodiques, mais pour beaucoup d’observateurs avertis, elles révèlent aussi des « plaies » plus profondes, et non cicatrisées, la France étant régulièrement mise en cause pour son ingérence (réelle ou supposée d’ailleurs), sur fond d’anti-impérialisme exacerbé.

Et lorsque ces ressentiments et ses motivations politiques se mêlent à des crises économiques ponctuelles, c’est le « cocktail détonnant » pour des scènes de pillage et de saccage. Plus globalement, les Etats africains ont encore un long chemin à parcourir pour enfin faire baisser significativement leurs taux de criminalité, ce qui encouragerait les IDE (investissements directs à l’étranger) et profiteraient notamment aux entreprises françaises sur place.

Ainsi que nous l’avons vu précédemment, certaines de nos sociétés ont déjà réussi à s’implanter avec succès sur ce continent africain à la fois si prometteur et parfois si paradoxal … alors, gageons que ces problèmes sécuritaires finiront par s’estomper car les perspectives de croissance à la clé sont assurément attrayantes.

Crédit photo : Yanick Folly, Leo Moko

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